Dans le Tour du monde sans un rond, l’auteur Matteo Rannacchi raconte, comme le dit le titre, son tour du monde, fait en 100 et quelques jours et sans aucun bagage ni argent. Le projet est d’établir un Guiness Record pour ce voyage exceptionnel.
Auteur : Matteo Pennacchi (It)
Titre original : Il grande sogno. Il giro del mondo senza un soldo in tasca
Paru en : 1999 (It) ; 2002 (Fr)
Les pays parcourus sont nombreux, mais à cause de la limite de temps (auto-)imposée concrètement on en voit très peu : l’Italie (son point de départ) un chouia à travers une fenêtre de voiture qui file sur l’autoroute, puis la Russie avec un passage sympa sur le Transsibérien, la Chine, la Corée et les Etats-Unis. L’absence de points de suspension est délibérée, parce que c’est vraiment tout. Un peu léger comme tour du monde ! Il y a pas mal d’anecdotes sur ce qu’il vit à chaque fois, dont certaines rigolotes.
Puisqu’il part sans argent ni vêtements de rechange ni nourriture, comment fait-il ? Et bien il essaye de construire dans son sillage une « chaine universelle de la solidarité ». Traduction : il compte uniquement sur ce que vont lui offrir les gens, et si ça marche pas il force un peu le destin et la solidarité en volant ou trichant. Pendant toute l’histoire on le suit donc en train de demander beaucoup de tout le monde, mais sans jamais rien donner en échange ou très peu (il cuisine des lasagnes une fois et des spaghettis une autre fois, youhou !), mais par contre toujours en se donnant le beau rôle et en se faisant passer pour le héros de l’histoire.
Le voyage en lui-même et les contraintes sont vrais, mais les trois-quarts de ce qu’il raconte paraissent très remaniés et romancés. Toutes les personnes sympathiques qu’il rencontre (pour lui = ceux qui lui donnent à bouffer, l’accueillent gratuitement et si possible lui payent son prochain billet de bus) sont des philosophes éclairés qui balancent à coups de pelletées étouffantes des « phrases de la vie » toutes plus sages et plus aphoristiques les unes que les autres. Quant aux subtilités et à la richesse des personnes rencontrées en chemin, je vous laisse juger : les russes sont grognons et sévères, les asiatiques sont travailleurs, bouffent du chien et ont des sages à longues barbes qui font des arts martiaux à chaque coin de rue, les français sont mesquins et sales, les américains sont des policiers violents ou des obèses, les américaines sont alcooliques et siliconées, les vagabonds croquent la vie à pleine dent, les homosexuels ont des amitiés masculines forcément perverses et des coussins en dentelle rose partout chez eux … Si c’est pour ne rien dire de plus que des stéréotypes plus ou moins affligeants, autant rester dans son canapé et s’épargner ces milliers de kilomètres, non ?
L’écriture est plutôt simple et sans chichis la plupart du temps. Un très bon choix quand il exprime du factuel, mais l’auteur s’obstine trop fréquemment à nous éclairer de ses interprétations d’expert en socio-économie et de grand sage autoproclamé. C’est bateau, ça ralenti, ça coupe, et on veut lui foutre des claques à chaque fois. Je précise que je parle du livre dans sa version française, une traduction par Claire Bonnefois que je n’ai d’ailleurs pas trop appréciée.
Bilan personnel : Quand il est en Chine, un énième vieillard plein de sagesse lui dit « seul un Occidental peut avoir une idée aussi belle [faire un tour du monde] et la gâcher en songeant à établir un record ». Très très vrai à mes yeux, le voyage du livre perd de sa valeur en étant une succession sans fin et sans but véritable de on-ne-sait-pas-trop-quois à part d’aller au prochain point. Le livre, lui, a aussi été gâché pour moi par la personnalité et les manières détestables de Matteo Pennacchi.